EN COLLABORATION AVEC L'ANTHROPOLOGUE ARIANNA CECCONI
LIENS:
Arianna Cecconi, anthropologue, analyse les usages sociaux du rêve: les rêves, l’imaginaire, les pratiques rituelles, l’expérience de la migration, les formes locales de transmission de la mémoire, les processus de ré-élaboration de la violence, ont été ses principaux sujets d’études ethnographiques qu’elle a menées sur différents terrains: dans les Andes Péruviennes, en Espagne, en Italie, en France.
Nous nous sommes connues en Italie en 2001 et nous sommes liées depuis d’une amitié profonde. L’improvisation d’images à partir d’une manipulation d’objets s’est révélée une pratique efficace pour travailler sur les formes et les contenus des rêves et a donné lieu à une dense collaboration avec Arianna, dans son terrain de recherche. Nos échanges ont produit à partir de 2011, date de notre première collaboration officielle, une prolifération de projets multidisciplinaires autour des rêves nocturnes au sein de différents territoires .
L'ONIROSCOPE
Au cours d’une résidence à l’Iméra (Institut d'études avancées d'Aix-Marseille Université) en 2013-14 nous avons développé un dispositif de cinéma participatif, l’Oniroscope, qui puisse servir d’un côté à mettre en scène l’imaginaire onirique de différents groupes de personnes, et, de l’autre, à archiver les résultats de nos découvertes ethnographiques et artistiques. Un nouveau dispositif est né, et si j’avais jusqu’ici exprimé mon imaginaire par l’animation de mes objets, j’aurais dorénavant appliqué mes techniques filmiques aussi à l’exploration d’objets et d’imaginaires d’autrui .
Nous demandons aux participants à l’Oniroscope d’amener un rêve à raconter, un rêve que, pour une raison ou l’autre, ils ont envie de partager avec le groupe. Nous leur demandons aussi d’amener un objet qui peut s’associer, par des liens tout à fait libres et personnels, au rêve qu’ils nous raconteront. Pendant l’Oniroscope je anime, chacun à son tour, les objets qui ont été amenés, pendant que les participants racontent leur rêve. La rencontre est animée par Arianna, qui encourage les participants à s’exprimer, à poser des questions, à intervenir pendant que chacun raconte ses expériences. Pendant que les rêves sont racontés le groupe assiste à la fois à mes manipulations des objets sous l’oeil du caméscope, autant qu’à la réalisation d’images qui, sur l’écran, suivent le récit du rêve qui est en train d’être raconté. Il s’agit ici encore d’improvisation en temps réel, et cette fois-ci l’interaction se tisse directement avec le public. C’est dans ce sens que nous définissons l’Oniroscope une expérience participative publique.
Qu’il s’agisse de musique, d’images ou encore de mots, ce sont l’association entre eux au-delà de toute filtre critique d’évaluation ou interprétation et l’improvisation qui sont la méthode d’action qui me rapproche le plus du langage des rêves. L’improvisation peut en effet à tout moment réaliser et jouer avec des associations d’idées absurdes, mais peut aussi engendrer à certains moments des messages symboliques profonds, tout à fait inattendus. Il s’agit souvent de révélations que nous arrivons difficilement à expliquer avec des mots cohérents, et pourtant ils nous rappellent « quelque chose » de notre vécu intime. Nous avons constaté cette résonance au cours des nombreux Oniroscopes réalisés avec Arianna et des publics très divers. J’ai mis, dans ce dispositif d’enquête et de rencontre de groupes, toutes les techniques affinées par le Manucinema, le jeu improvisé de la caméra et des images, à l’écoute des rêves des participants et de leurs objets/souvenirs. Ce jeu collectif d’association d’images fabriquées au fil des récits stimule un processus collectif d’exhumation de souvenirs et de sensations à propos des rêves, au-delà de toute cohérence et vraisemblance. Il est devenu un outil d’enquête ethnographique pour Arianna autant qu’une source de techniques nouvelles d’approche de l’imaginaire et de la réalisation vidéo.
L'ATELIER SOMMEIL
Les rêves nous ont guidées vers une exploration du sommeil , et à la rencontre de Marc Rey, président de l’INSV (Institut National du Sommeil et de la Vigilance) et ex-responsable du Centre du Sommeil de l’Hôpital de la Timone, et de Frédérique Fabre, psychologue clinicienne. Nous avons monté une équipe multidisciplinaire de recherche-action sur les troubles du sommeil qui travaille depuis 2018 par un financement de l'ARS. L'Atelier Sommeil est un cycle de rencontres qui s'adresse aux mères d'enfants en bas âge, dédié aux enjeux de la transmission du sommeil de la mère à l'enfant.
La création d'images, de sculptures et d'illustrations s'applique à la recherche pour réaliser des supports de communication, pour engager le public dans la création d'un matériel iconographique sur le sommeil qui soit adapté à l'époque et à la société, et aux conditions réelles de vie dans les quartiers de Marseille les plus défavorisés.